Côte d’Ivoire : magouilles autour des exonérations TVA et du règlement 14 Uemoa

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Que ne feraient pas certains opérateurs économiques pour échapper aux règles, et accroître leurs profits au détriment des autres opérateurs, de l’État, et du consommateur ?

C’est le constat fait par L’Intelligent d’Abidjan sur le terrain, suite à deux faits qui interpellent, dans le secteur du transport de marchandises et du commerce de certains biens et vivres depuis quelque temps : les attestations frauduleuses d’exonération fiscale ( mais aussi des attestations d’exonération régulières utilisées à des fins frauduleuses ) ; et d’autre part la surcharge des camions à essieux, signe du non respect des prescriptions en la matière, notamment le règlement 14 de l’Uemoa. Un fait que nous avons déjà évoqué dans notre parution de mercredi dernier.
Ces deux faits concernent plusieurs secteurs d’activités, notamment le commerce des vivrières, ainsi que celui des matériaux de construction. Selon nos informations, ils ont fait l’objet de plaintes auprès du Fonds d’entretien routier , et de la direction des impôts, ainsi que d’autres administrations concernées ( ministères du transport, et du commerce ).

[ Attestations frauduleuses d’exonération de TVA et attestations d’exonération régulières utilisées à des fins frauduleuses ]

Selon les informations recueillies , l’obtention d’une attestation d’exonération, est un parcours du combattant. La fraude dans ce secteur fait encourir de grands risques. Ainsi lorsque des opérateurs économiques présentent le fameux document visé par les impôts, peu de gens osent mettre en cause leur bonne foi. L’exonération est un document, qui au vu des investissements réalisés, et du secteur d’activité , permet de ne pas payer la Taxe sur la valeur ajoutée, ou la TVA. Par exemple au niveau des logements sociaux, le document permet d’obtenir le ciment, le fer, le béton, et les produits manufacturés à des prix hors taxes. Cela ne devrait poser problème à personne, en principe .
[ Et pourtant il y’a problème ! ]

Il y’a problème parce que souvent, certains industriels et fournisseurs ne respectent pas les trois conditions nécessaires, qui rendent valables une exonération à savoir : l’identification du chantier, le volume autorisé et la durée du projet, pour s’assurer que cela est conforme aux prescriptions des impôts.
Des fournisseurs et industriels ne procèdent à aucun contrôle à cet effet, selon des témoignages recueillis. Ainsi à force de vouloir écouler rapidement leurs produits, ils ferment les yeux sur la magouille, et se rendent complices d’une forme de fraude. En quoi consiste cette fraude ? C’est simple : celui qui dispose d’une exonération souvent frauduleuse ou même régulière , ( mais dont l’usage conduit quelques fois à la fraude et aux abus ) , achète sans taxe sur la valeur ajoutée ( 18% d’économie ) une importante quantité de matériaux de construction. Une quantité qui va au delà de ses propres besoins, et qui a été obtenue par les fournisseurs qui prétendent toujours pouvoir s’arranger avec les impôts en cas de conflit.
Lorsque le client atteint la satisfaction de ses besoins propres, de ses besoins personnels ( et souvent même sans avoir rien utilisé pour ses priorités projets ), il devient un revendeur, et déverse sur le marché le surplus des biens acquis. Cela se fait avec la complicité active de certains industriels et fournisseurs, qui font sortir d’importantes quantités de produits sous le régime de l’exonération. Tout cela se retrouve sur le marché. Les produits sont ainsi vendus à des prix plus bas, que ceux des autres industriels et fournisseurs.

[ Des opérateurs dénoncent ]
« C’est une concurrence déloyale au détriment de nos entreprises ; mais c’est aussi une pratique qui fait perdre de l’argent à l’État. Enfin, à terme dans la chaîne, certains sous revendeurs finissent quand même par encaisser cette TVA. Ils répercutent cela sur le consommateur, sans que l’État n’y gagne quoi que se soit ! La situation devient intenable », soutient un industriel basé à Koumassi.
M.A, responsable d’une structure de distribution de fer à béton, ne sait plus à quel saint se vouer. «C’est vraiment difficile pour nous. Ces sociétés immobilières qui bénéficient d’exonération nous mènent la vie dure. Nous sommes des structures légalement constituées, qui vivons de la livraison des matériaux de construction aux magasins de reventes. Mais, certaines de ces structures immobilières ont pourri le marché. Des clients se tournent de plus en plus vers elles. Et nous qui payons régulièrement nos impôts, sommes là, impuissants», s’est lamenté ce chef d’entreprise. Il a particulièrement pointé un doigt accusateur sur certaines entreprises bénéficiant de marchés de construction de logements sociaux. Car, dira-t-il, «La situation devient critique, chaque fois que le gouvernement lance des programmes de logements sociaux».

K.S un autre distributeur de fer à béton, lancé le même signal d’alarme. Pour lui, le gouvernement devrait songer à purement et simplement songer à ne plus faire délivrer des attestations d’exonération de TVA. Car, selon lui, tant que cette brèche sera ouverte, ces pratiques «peu recommandables» ne connaîtront pas de fin. «Tant que cette histoire d’exonération ne prendra pas fin, ces entreprises peu scrupuleuses continueront de prospérer et de tuer nos activités», a-t-il interpellé. « Ce n’est pas de nature à nous arranger. S’il n’y pas possibilité d’arrêter la délivrance de ces attestations, Ou de prévoir des contrôles très stricts pendant toute la durée du chantier. Nous invitons le gouvernement a durcir davantage les conditions de délivrance et de contrôle. Nous appelons la DGI à un peu plus de sérieux dans l’étude des dossiers des postulants», a-t-il appelé.
Contactée pour réagir, la direction des grandes entreprises à la direction générale des impôts (DGI) qui s’occupe de ces dossiers, n’a pas souhaité se prononcer sur le sujet, sans l’accord préalable du Directeur général des Impôts, à qui un courrier a été transmis, dans ce sens par nos soins.

[ Non respect de la charge réglementaire sur les véhicules ]
Le second fait observé sur le terrain , en guise de signe d’une concurrence déloyale, est relatif au non respect des dispositions, en terme de charges sur les véhicules. Cela met aussi bien à mal les routes, et infrastructures, que les biens, selon un prospectus diffusé par le Fonds d’entretien routier en 2018.
Le non respect des règles , ou du règlement 14, expose pourtant selon le document. Une amende de 20 mille FCFA par tonne excédentaire, pour tout camion pris au niveau du trafic national. Au niveau du trafic international (en provenance d’un pays voisin), le camion en infraction paiera une amande de 60 mille FCFA par tonne excédentaire. Pour tout camion, quelle que soit sa provenance, le gabarit hauteur est limité 4,5m. Tout camion pris en violation de cette règle paie une amande de 100 mille FCFA. Si le véhicule n’est pas passé sur un pont bascule et qu’il ne détient pas un ticket de passage, il écope d’une amende de 200 mille FCFA. En cas de refus délibéré de faire peser, le camion écope d’une amende de 100 mille FCFA. Malgré tous les méfaits que cela engendre, il se trouve des acteurs économiques, abonnés à cette pratique, dans plusieurs secteurs.
L’application du règlement 14 stipule un contrôle de chaque essieu des camions transportant une marchandise. Cela implique l’équipement en dispositif spécial de pesage « Pèse Essieux » , dont peu d’opérateurs disposeraient en infraction totale avec les prédispositions du règlement 14. D’autres opérateurs, se trouvent sur l’autoroute PK26 au-delà du poste public de contrôle de poids. Ces derniers échappent totalement à ce règlement et se permettent de faire bénéficier à leurs clients des surcharges non-contrôlées.
[ Qu’est-ce qu’ils gagnent donc à faire cela ? ]
Charger 40 tonnes à la place de 30 tonnes réglementaire, permet, a appris l’IA, de livrer 40 tonnes de vivres, de ciment , de fer et autres, au prix de 30 tonnes. Cela fait baisser les prix de façon irrégulière. Les opérateurs qui refusent de s’adonner à cette pratique, subissent ainsi une concurrence déloyale. Les usagers et consommateurs semblent gagner sur le moment, mais à terme, la communauté nationale, paie un lourd tribut pour ce type de pratiques.

L’absence de contrôle et de vigilance, ainsi que l’existence de complicités à plusieurs niveaux permettent tout ce qui est décrit dans ce dossier.

L’attention de tous les acteurs concernés et des parties prenantes, méritent d’être attirée, pour les inciter à redoubler d’efforts. Les opérations de sensibilisation, ainsi que le contrôle à l’essieu, au niveau des ponts basculés sur les routes devraient reprendre. Le positionnement des points de contrôle devrait permettre le contrôle des poids à l’essieu de l’ensemble des transporteurs sans distinction de provenance et de points de chargement. Ainsi que l’application sans faiblesse des sanctions pour les contrevenants.
Le fonds d’entretien routier fait un excellent travail. Les impôts fournissent également de grands efforts. Les deux constituent un modèle d’excellente gestion. L’existence des pratiques dévoilées est susceptible de mettre à mal leurs performances.
Charles K et JHK

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