LA CHRONIQUE DU LUNDI-24 janvier: Journée mondiale de la culture africaine et afro-descendante

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Dernère publication

La culture comme marque de l’identité

Dans le « monde nouveau » qui se caractérise par la globalisation des échanges commerciaux, la puissance économique, forte ou faible, de chaque pays et des grandes régions du monde leur confère une identité. C’est oublier que les pays et les grandes régions possèdent une identité culturelle. L’identité culturelle est ce par quoi se reconnaît une communauté humaine à travers ses pratiques, locales ou nationales, qui sont sociales, politiques, ethniques, religieuses, artistiques, etc. Cette identité culturelle nous renvoie à des valeurs et à des codes, à des modes de vie et de pensée, à des langues, à des croyances et des traditions, à un vécu en commun et une mémoire historique, à un territoire. L’Afrique a trop longtemps été privée de son identité culturelle. Par méconnaissance, les cultures africaines sont devenues des « objets » exotiques. Or, l’exotisme ne définit pas une identité, c’est un simple point de vue ou un discours sur l’autre ou sur un lieu. L’exotisme nourrit des flots touristiques attirés par le lointain et le « bizarre », mais qui continuent d’ignorer l’identité culturelle de l’Afrique, son foisonnement, sa richesse et ses valeurs. Aujourd’hui, les initiatives se multiplient afin de mieux faire connaître l’identité culturelle du continent. Parmi ces initiatives, figure la remarquable « Journée Mondiale de la Culture Africaine et afro-descendante » (JMCA), une idée de John Ayité Dossavi. « Imaginée » en 2011, cette « Journée » a commencé à exister en 2014 avec l’objectif suivant : faire de l’identité culturelle l’un des piliers de l’identité panafricaine, en s’inspirant de la date de la Charte de la Renaissance Africaine. L’Afrique ne peut pas être vue uniquement à travers le prisme étroit de l’économie. Si l’Afrique existe aujourd’hui, ce n’est pas simplement comme vecteur de la croissance mondiale.

Le projet de John Ayité Dossavi

Le projet de John Ayité Dossavi a pris une dimension importante au fil des années. Il est relayé aujourd’hui par l’UNESCO qui, en 2019, à l’occasion de sa 40e Session de la Conférence générale, a proclamé le 24 janvier « Journée mondiale de la culture africaine et afro-descendante ». De façon pragmatique, les États , les associations qui y participent et les entrepreneurs de spectacles culturels célèbrent cette « Journée » comme ils le souhaitent. La « Journée » a une forte portée symbolique : elle vise, au-delà de l’immense foisonnement culturel et artistique qu’il faut découvrir et connaître, à installer la culture comme un outil efficace au service du dialogue entre les peuples et de la paix universelle. « La Journée mondiale de la culture africaine et afro-descendante est une agora pour l’humanité », selon John Ayité Dossavi. Il définit, métaphoriquement, la JMCA comme un immense « espace » de dialogue à l’échelle de la planète. Pour John Ayité Dossavi, la JMCA permet « à toutes les populations africaines d’être en communion » et à la planète entière d’être en communion avec l’Afrique.

Pourquoi le 24 janvier ?

Le 24 janvier 2020 a vu la première célébration de cette « Journée » sous l’égide de l’organisation onusienne depuis son inscription au calendrier de l’Unesco en 2019. Il s’agit d’une formidable reconnaissance pour John Ayité Dossavi, le président du Comité de mobilisation de la Journée mondiale de la culture africaine, qui promeut la JMCA depuis près de 10 ans. Sur la recommandation du Premier Congrès panafricain sur la place de la culture dans le développement de l’Afrique organisé par le Réseau africain des promoteurs et entrepreneurs culturels (Rapec), la date du 24 janvier a été choisie, parce qu’elle correspond à l’adoption de la Charte de la Renaissance culturelle africaine. En inscrivant à son calendrier mondial cette date du 24 janvier, l’UNESCO a donné à cette « Journée » une dimension exceptionnelle. Mais, John Ayité Dossavi tient à rappeler que « depuis 2014, où la journée a été lancée, nous avons mobilisé un certain nombre d’institutions – comme l’Unesco, le Groupe des Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), Cités et Gouvernements Locaux Unis d’Afrique (CGLUA), l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) –, des promoteurs et entrepreneurs culturels et les chefferies traditionnelles afin que cette date soit célébrée. » Il ne faut pas oublier le rôle joué par le Rapec dans l’organisation de cette « Journée ». Le Rapec, le Réseau Africain des Promoteurs et Entrepreneurs Culturels créé en 2007, dont John Ayité Dossevi est le fondateur et le président, est une ONG qui vise à fédérer les forces, les énergies et les compétences, afin de faire de la culture un véritable levier de développement de l’Afrique. C’est à travers la culture que l’Afrique doit exprimer son dynamisme et le dynamisme créatif de ses populations, en particulier de sa jeunesse et des femmes africaines. Aujourd’hui l’ambition est de transformer le Rapec, en fondation pour passer à une autre étape.

Le rôle économique de la culture

Un discours réducteur, saturé des valeurs de l’économie libérale, tend à ne voir l’Afrique que comme l’un des leviers de la croissance mondiale avec, comme sources de revenus, la richesse de son sous-sol et ses matières premières agricoles brutes.
Homme de culture, romancier, Wakili Alafé, le patron d’un groupe de presse important, considère que « la culture joue un rôle de plus en plus important dans les économies et la croissance des pays africains ». Membre du Rapec, président du Comité d’Organisation de la Journée du 24 janvier en Côte d’Ivoire, Wakili Alafé définit ainsi les industries culturelles : « À côté de la visibilité qu’elles offrent à l’Afrique, ce sont des activités économiques à part entière, créatrices d’emplois et de richesses. Les Américains ont Hollywood, les Indiens, Bollywood. Le Nigeria a su créer Nollywood. Abidjan essaie de lancer Babiwood ». Promouvoir la culture africaine, le 24 janvier, est, pour Wakili Alafé, « un acte citoyen qui permet d’affirmer l’identité de l’Afrique et la fierté d’être Africain ». Aujourd’hui, le rayonnement de la culture africaine se fait par la musique : l’afrobeats a conquis les « dance floors » du monde entier.


Christian GAMBOTTI, Agrégé de l’Université,
Président du think tank Afrique & Partage-
CEO du CERAD (Centre d’Etudes et de Recherches sur l’Afrique de Demain) –
Directeur des Collections L’Afrique en Marche, Planète francophone –
Directeur de la rédaction du magazine Parlements & Pouvoirs africains

 

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