Rencontre Ouattara-Soro : une victoire contre les complotistes et les accusations (Nyamsi)

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Sous le titre « Audience historique d’Alassane Ouattara à Guillaume Soro: une victoire contre les catastrophistes, alarmistes et complotistes de tous bords », Franklin Nyamsi livre sa lecture enthousiaste de la rencontre du 3 novembre 2017entre le Président ivoirien Alassane Ouattara, et le Président de l’Assemblée nationale , Guillaume Soro.

En évoquant entre autres ceux qui auraient sommé « pratiquement le Président Alassane Ouattara de croire qu’un coup à la Brutus se préparait contre lui, les complotistes –improvisés en sécurocrates opportunistes », cette analyse qui fait office de premier décryptage, ne manquera pas de susciter d’autres réactions.
Une grande nation vit de la sauvegarde de ses traditions pérennes et fécondes. Le dialogue et la concertation permanents font partie des arcanes des républiques démocratiques. Qui plus est, lorsque la constitution de ces républiques prévoit à la fois la séparation des trois pouvoirs et leur coopération mutuelle, dans l’intérêt supérieur de la nation entière. Point besoin de grandes démonstrations logiques pour se convaincre que la Côte d’Ivoire de la 3ème république, née de la constitution d’octobre 2016, mais aussi de la profonde tradition de paix et de dialogue instaurée par la magistrature pédagogique du Président Félix Houphouët-Boigny, ne saurait se passer de ces arcanes sans passer du même coup à côté de sa propre dimension destinale. La symbolique africaine de l’arbre à palabres vient du reste enraciner ces ressources spirituelles de l’entente mutuelle en terre d’Afrique.

Point besoin de regarder dans les caniveaux arriérés de la haine identitaire, ou dans les relents claniques et pervers d’un certain néo-patrimonialisme cynique, pour comprendre que l’intérêt supérieur de la nation ivoirienne passe par la priorité de l’entente cordiale sur la pulsion fratricide, du respect des paroles données sur les ruses vouées à l’éphémère. La priorité de la sauvegarde du Bien Commun que constituent la paix, la justice et la prospérité partagées, sur les jouissances égocentriques de la rancœur, de la rumeur empoisonnante, ou de la gloriole sans lendemain. Priorité du pays sur tous les préavis.

La rencontre entre le Président de la République de Côte d’Ivoire, Son Excellence Alassane Ouattara, et le Président de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire, Son Excellence Guillaume Soro, en ce vendredi 3 novembre 2017 répond donc aux plus hautes exigences de l’intérêt collectif des Ivoiriens. Loin d’appartenir au train-train ordinaire des entrevues liées au fonctionnement quotidien de l’Etat, cette rencontre s’inscrit dans la chair symbolique de l’histoire nationale pour trois raisons :

1) Son contexte ;

2) Sa signification ;

3) Sa portée. Je voudrais donc consacrer la présente chronique à creuser ces trois filons de sens.

I – Le contexte de la rencontre Ouattara-Soro du 3 novembre 2017

L’année 2017, comme l’a sincèrement souligné le Chef de l’Etat ivoirien à sa sortie de visite chez le Président Bédié, ne fut pas de tout repos pour le régime. Sur le plan sécuritaire, les mutineries de janvier et de mai 2017 ont rappelé aux opinions nationales et internationales que la Côte d’Ivoire n’a pas fini de panser les plaies nées des trois décennies de désaccords et de violences qui ont suivi le décès du Président Félix Houphouët-Boigny. On a objectivement constaté que le pays devrait davantage s’occuper de ses armées, police, douane, eaux-et-forêts, bref de tous ses « corps habillés » que jamais. La sécurité est la véritable clé de l’essor multidimensionnel des Républiques.
Par ailleurs, une conjoncture économique peu favorable est venue se greffer à ce contexte sécuritaire inquiétant. La baisse drastique des prix du Cacao a entraîné une réduction brutale de la capacité d’investissement de l’Etat et une baisse conséquente des revenus des paysans, poumons de l’économique encore fort extravertie du pays. Le cortège des revendications corporatistes – fonctionnaires, étudiants, etc- qui s’en sont suivies n’est pas venu davantage arranger la conjoncture.
Enfin, cheveu qui manque rarement dans la soupe dans ces conditions, le contexte politique s’est tendu, sous l’effet conjugué de trois phénomènes :
a)-Une montée en épingle des rumeurs contre l’entourage et la personnalité du Président de l’Assemblée Nationale, que de nombreux discours ont voulu lier par tous les moyens possibles aux troubles dans les armées, en même temps que se popularisait pourtant le leitmotiv du pardon et de la réconciliation nationale lancé par Guillaume Soro le 3 avril 2017. Dans la foulée, la non-participation de Guillaume aux assises du congrès du RDR a servi de prétexte supplémentaire à la surenchère des procès d’intentions contre sa personne.
b)-Une montée en gamme du conflit herméneutique autour de l’interprétation de l’Appel de Daoukro lancé le 17 septembre par le Président Bédié, avec de nombreuses frictions entre les élites du RDR et du PDCI-RDA sur la gestion du pouvoir à l’horizon 2020 ; tension entre le PDCI-RDA et le RDR qui s’est traduite également par la raréfaction des entrevues entre le Chef de l’Etat ivoirien et son aîné houphouétiste, le sage de Daoukro.
c)-Une montée en gamme, dans un contexte où les revendications socioprofessionnelles et la crise de l’éducation prospèrent, d’un sentiment d’insécurité collective lié aux attaques de commissariats et de postes de gendarmerie, aux nombreuses scènes de braquages spectaculaires qui défraient la chronique du pays, tout comme les actes de barbarie des nouveaux « enfants sauvages » des villes ivoiriennes, « les microbes ».
Comment nier dans ces conditions que les succès infrastructurels, macroéconomiques ou diplomatiques du gouvernement, n’ont pas réussi à faire barrage au triple discours catastrophiste, alarmiste et complotiste, qui s’est mis à prendre littéralement l’opinion nationale et internationale en otage à propos de la Côte d’Ivoire ? Certains, les catastrophistes qui ne vivent que de l’invocation du désastre, ont cru la Côte d’Ivoire maudite, la voyant retourner littéralement dans le bourbier qu’elle aurait dû à jamais cesser d’être. D’autres n’ont pas hésité à promettre ni plus ni moins que l’inéluctabilité d’une guerre civile de règlement de soldes de tous comptes entre anciens ennemis, ou éventuellement, entre récents alliés. Enfin, la plus dangereuse des engeances s’est focalisée sur l’agitation du chiffon rouge du coup d’Etat permanent. En sommant pratiquement le Président Alassane Ouattara de croire qu’un coup à la Brutus se préparait contre lui, les complotistes –improvisés en sécurocrates opportunistes- ont cru pouvoir ainsi isoler le Chef de l’Etat de ceux-là mêmes en qui, depuis de longues décennies, il avait victorieusement placé sa confiance. Quelle est donc la réponse que l’audience accordée par le Président de la République le 3 novembre au Président de l’Assemblée Nationale apporte à ces trois discours de la désespérance ?

II – Le sens d’une audience historique

Rentrant de son dernier périple européen, le 22 octobre 2017, Guillaume Soro, dans un esprit de reconnaissance et de modestie non feinte, a affirmé haut et fort son intention de veiller à préserver de bonnes relations envers son supérieur hiérarchique et doyen politique, le Président Alassane Ouattara. Cette seule annonce, à l’aéroport d’Abidjan, faite sous les flashes des caméras ou la fièvre des micros en attente d’un scoop offensant, a servi de déconstruction aux discours catastrophistes, alarmistes et complotistes ambiants. En parlant avec mesure, responsabilité et gravité, Guillaume Soro a détourné et retourné par la puissance spirituelle de sa volonté de progrès national les forces maléfiques qui étaient en gestation dans le contexte susévoqué. Certains auraient voulu, pour confirmer leur désir de dérouler un rouleau compresseur de violence contre la paix des Ivoiriens, que Guillaume Soro campe un discours guerrier, haineux, rageur et rancunier. Ils se sont fourvoyés à distance : c’est au nom de la paix, de la réconciliation, du pardon et de l’arbitrage équitable des conflits que le Chef du Parlement Ivoirien s’est désormais dévoué.
Comment pour sa part, le Président Alassane Ouattara a-t-il réagi face à ce contexte surchauffé ? En trois actes, qu’il nous plaît de souligner. D’abord, le Président Ouattara prend la parole et évoque ses relations avec son cadet, Guillaume Soro qu’il lui d’ailleurs arriver autrefois de présenter comme son fils, devant le Président Bartolone à Abidjan, en 2013. Il y a donc cette interview de New York le 19 septembre 2017, où répondant à une question sur ses relations personnelles avec Guillaume Soro, le Chef de l’Etat botte en touche, préférant remettre à plus tard, sa prise de parole sur ce dossier. Puis, il y a cette interview de Niamey, le 24 octobre 2017, où le Président Ouattara, usant avec autorité de son droit d’aînesse à l’africaine, rappelle qu’il a tout loisir de s’entendre avec Guillaume Soro, puisqu’il le connaît et qu’une relation de confiance les a toujours liés. La formule « il ne saurait y avoir de crise entre le Président de l’Assemblée et moi » sonne ici davantage comme la certitude que les nuages que certains voient à l’horizon de la relation Ouattara-Soro ont vocation à être décantés entre les deux hommes. Acte I donc.
Ensuite, Acte II, Le Président Alassane Ouattara commence par briser le halo de suspicion qui planait dans l’opinion sur sa relation avec le Président du PDCI-RDA, Aimé Henri Konan Bédié. Il lui rend visite et s’entretient longuement avec lui, le mardi 31 octobre 2017. Se voulant rassurant sur l’alliance houphouétiste, le Président de la République confirme sa volonté d’aller au bout de ses promesses envers son allié. Il adresse aussi à la nation ivoirienne, un message de confiance quant à la formation future du parti unifié houphouétiste dont il annonce l’accélération des travaux préparatoires.
Enfin, Acte III, le Président Alassane Ouattara reçoit en audience le 3 novembre 2017, son cadet politique, le Chef du Parlement Ivoirien Guillaume Soro. Le Chef de l’Etat brise ainsi le troisième anneau maléfique du contexte politique ivoirien que nous décrivions précédemment. En elle-même, cette audience est un langage. Elle dit que les deux hommes savent toujours se dire en face ce qu’ils ne diront jamais à personne d’autre. La pratique du dialogue entre les trois pouvoirs solidaires de la République est la clé de voûte de sa stabilité durable. Cette audience dit que le Président de la République et le Président de l’Assemblée Nationale savent qu’ils sont mis en demeure, par la majorité de leurs concitoyens, d’accomplir les promesses de sécurité, de paix, de justice et de prospérité. Comment ne pas saluer cette haute conscience des intérêts supérieurs de la nation ? En recevant Guillaume Soro en audience, le Chef de l’Etat confirme qu’il n’y a aucun crédit à donner aux accusations de déstabilisation de l’Etat que certains ont cru pouvoir faire porter au Chef du Parlement. Ensemble, les deux hommes d’Etat mettent donc un vigoureux coup d’arrêt aux prétentions des catastrophistes, alarmistes et complotistes de tous bords à jouer à la balle comme le ferait le diable avec l’âme de ce pays. Et c’est toute la Côte d’Ivoire qui gagne.

III – Portée de cette audience historique du 3 novembre 2017

Je me suis donc limité au sens de l’audience, à la noble intention qui la gouverne, puisque je n’ai pas eu accès à son contenu. Nul besoin d’écouter toutefois aux portes, ou d’être devin pour comprendre le message que le Président de la République et le Président de l’Assemblée Nationale nous adressent par ces heures de vérité passées l’un face à l’autre le 3 novembre 2017. Un vendredi de synthèse, comme la symbolique spirituelle du nombre 3 nous l’apprend: nombre du rassemblement de l’épars.

En démocratie, en république et plus largement en politique, l’unanimité n’est jamais la règle, mais toujours l’exception. L’essentiel de l’art politique est donc dans la méthode de résolution des conflits et non dans la négation des conflits. En s’ouvrant à l’écoute de son cadet politique Guillaume Soro, le Président Ouattara touche le cœur de la génération politique qu’incarne éminemment le Chef du parlement. En recevant Guillaume Soro, notre doyen Alassane Ouattara demeure au service de l’espérance intergénérationnelle que son œuvre a favorisée. Nous ne pouvons demeurer insensibles à cette sollicitude. Et nous pouvons désormais penser qu’en faisant taire les catastrophistes, les alarmistes et les complotistes qui s’acharnent à noyer leur relation dans la méfiance et la défiance, Alassane Ouattara et Guillaume Soro dessinent sur le visage de la Côte d’Ivoire, le sourire de la confiance sauvegardée. Puisse cet augure annoncer des années bénies pour cette terre d’espérance et d’hospitalité, qui mérite qu’on lui offre le meilleur du génie humain : la Côte d’Ivoire, qui retrouve ainsi sa côte d’espoir.

Franklin Nyamsi,Professeur agrégé de philosophie, Paris-France

Le chapeau et le titre sont de la rédaction

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