Dernère publication
29 juin 2007-29 juin 2017. Cela fait dix ans aujourd’hui jour pour jour qu’est survenu l’attentat contre le Fokker 100, l’avion qui transportait le président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro alors premier ministre à Bouaké . Les victimes de cet attentat regroupées au sein de l’ “Amical du Fokker 100” ont décidé de le commémorer le jeudi 29 juin à Bingerville à travers des plants d’arbres. L’IA revient sur cet attentat, à travers ses archives. Comment ce moment douloureux de l’histoire et l’actualité politiques ivoiriennes , avaient alors été traités ?
Au lendemain de l’attentat contre le fokker 100 , c’est-à-dire dans sa parution du samedi 30 au dimanche 1er juillet 2007 l’IA a tiré en sa manchette : ‘‘Après avoir échappé à la mort hier à Bouaké, Soro ne doit plus jouer avec le feu’’, avec l’image de l’avion perforé, en illustration.
Le journal ajoutait ce commentaire : ‘‘Tous les accords de paix signés de Lomé à Ouaga en passant par Prétoria l’ont prescrit. Mais jamais il n’ y a eu un début de desarmement. Le desarmement est la pierre angulaire de la réussite du processus de paix en Côte d’Ivoire’’. 5 pages avaient été consacrées à cet évènement, avec la publication de la liste des 4 morts et des 11 blessés.
« Soro pressentait un coup contre lui. Il s’était confié à des proches qui l’ont alors dissuadé de se rendre hier à Bouaké. Mais il s’est entêté en affirmant que si tel est son destin, il irait à la mort », avait confié un observateur à l’IA, qui à travers un commentaire signé de Valerie Foungbé, indiquait qu’en s’attaquant à Soro, les extremistes du camp Soro et de celui de Gbagbo voulaient empêcher le président Laurent Gbagbo de se rendre à Bouaké pour la flamme de la paix. Le journaliste notait aussi que l’attentat portait un coup au processus électoral dans la mesure où il est survenu au moment où des actions concrètes et décisives comme l’identification, les audiences foraines et le désarmement se déroulaient.
Au lendemain de l’attaque contre le fokker 100, l’Onuci dirigée alors par Fernand Amouzou a renforcé la sécurité du premier ministre Guillaume Soro. Elle a annoncé que des patrouilles aériennes avaient été organisées au-dessus de Bouaké quelques heures après l’attaque.
Réagissant l’ex-président burkinabé Blaise Compaoré qui était le facilitateur de l’accord de Ouattara , avait parlé d’ ‘’acte odieux’’, et invité la communauté internationale à soutenir l’accord de Ouaga “qui offre des chances réelles de sortie de crise en Côte d’Ivoire’’. Ban Ki Moon le secrétaire général de l’Onu à cette période avait lui aussi condamné l’attentat et appelé la communauté internationale à soutenir l’accord de Ouaga
[ Laurent Gbagbo : ” On n’assassine pas la paix” ]
Laurent Gbagbo, Président de la République de Côte d’Ivoire au moment où le Fokker 100 transportant le secrétaire général des Forces nouvelles Guillaume Soro a été bombardé à Bouaké, a réagi au lendemain de cette attaque, au cours d’une conférence de presse.
Dans ses échanges avec les journalistes nationaux et internationaux, Laurent Gbagbo a condamné cette attaque du 29 juin 2007 qui est survenue au moment où des négociations se déroulaient à Ouagadougou pour une sortie de crise en Côte d’Ivoire. « D’abord comme sentiment, nous condamnons avec la dernière énergie cet attentat qui vise, à travers la personne du Premier ministre, tout le processus de paix initié par l’accord de Ouaga. On n’assassine pas la paix. Nous allons continuer et je condamne les auteurs. Le Premier ministre et moi-même, depuis un moment, avions des informations selon lesquelles des gens voulaient faire un coup pour essayer d’arrêter le processus de paix. Donc il y’a des pièges qu’on a évités çà et là (…) C’est une attaque vaine parce qu’elle ne peut pas arrêter le processus de paix (…) “, avait-il dit.
D’autres réactions de condamnation de l’attentat contre Guillaume Soro et sa délégation n’avaient pas manqué : Géneviève Bro Grébé, présidente des femmes patriotes, Lucien Tapé, Konaté Sidiki, Charles Konan Banny, le directoire du G7 présidé par Alphonse Djédjé Mady, Eric Kahé, président de l’AIRD et toute la communauté internationale, avaient exprimé leur compassion en s’inclinant devant “les victimes du devoir” qui avaient perdu la vie, ce jour-là.
“Que les gens qui ont affaire aux FDS-FAFN sachent qu’ils auront désormais affaire aux FDS”, avait menacé le général Philipe Mangou, chef d’état-major de l’armée de Côte d’Ivoire lors d’une visite à Bouaké.
Charles Kouassi, journaliste et éditorialiste à l’IA dans une analyse tirait la sonnette d’alarme sur la situation : “La suite de l’attentat manqué contre le Premier ministre montre bien que la paix est encore loin, malgré le dialogue direct et la nomination de Guillaume Soro (devenu Premier ministre depuis au terme de la signature de l’accord de Ouagadougou, le 4 mars 2007. La paix est d’autant plus longue que le chef du gouvernement ne voulait pas aller vite et s’insurgeait contre le fétichisme des dates. À présent, des questions et des problèmes se posent. Ainsi à Bouaké, les interrogatoires des suspects sont faits par les FN sans la supervision des organisations de droits de l’homme ni la présence des membres de l’équipe internationale d’experts reclamés pour l’enquête. La police, la gendarmerie et la justice ivoirienne, dont Guillaume Soro en sa qualité de Premier ministre est l’un des responsables, sont absentes. Pendant que le monde entier commence à défiler à Bouaké, en attendant peut-être le chef de l’État, la réunification n’est pas encore une réalité. Pourtant, être Premier ministre de tous les Ivoiriens et à ce titre bénéficier de la compassion de tous dans le malheur comme du soutien et de la joie de tous dans le bonheur, c’est aussi et surtout cesser d’être un chef de clan (…) À en croire le Premier ministre qu’on pourrait soupçonner de vouloir falsifier et réécrire l’histoire récente de la Côte d’Ivoire, le charnier de Yopougon, c’est rien, les escadrons de la mort c’est rien, la mort de Boga Doudou, c’est rien, celle de Robert Guéi et des autres victimes peuvent bien passer par pertes et profits. Ainsi, la grande affaire pour le Premier ministre Guillaume Soro, c’est la tentative d’assassinat contre sa personne et le fait que l’avion ait été ciblé. Non, non, non, il y’a bien eu pire en Côte d’Ivoire et il faut avoir une pensée pour les victimes de tous les actes de recours à la violence dans notre pays depuis plusieurs années !
Aucune violence, aucun recours aux armes ne peut être justifié. Ni l’attaque du vendredi dernier, encore moins celle qui donne une légitimité à Guillaume Soro, parce qu’il aurait revendiqué la rébellion. Il est juste et légitime de condamner et de dénoncer avec fermeté et énergie l’attaque contre le Premier ministre, mais cela ne sert à rien si on le fait de façon sélective et si on ne se souvient pas des premiers recours à la violence. Qui a bu boira. C’est en cela qu’on a encore peur pour demain : si Guillaume Soro est devenu Premier ministre et acteur de la paix, après avoir pris les armes et sans opérer le désarmement, comment empêcher toute autre et nouvelle tentation de recourir aux armes ? Le sentiment de prime à la rébellion ne va-t-il pas toujours donner des idées à tous ceux qui se sentiront victimes d’injustice ? Mais alors, quelle solution faut-il pour sortir du trou ? Il faut une commission vérité et réconciliation, il faut de la tolérance, de l’ouverture, de l’humilité et une bonne dose de respect de l’autre. Il faut mettre fin à l’injustice, aller rapidement à des élections justes et transparentes et poursuivre la réconciliation et le partage du pouvoir, dans le cadre d’un État de droit et d’une pratique de l’éthique de la gouvernance “.
[ Dix ans après … ]
Dix ans après ces écrits “impertinents” dans ( et malgré le feu ) , le feu de l’action, publiés en toute responsabilité et en connaissance de cause, sont plus que jamais d’actualité ! Ils démontrent la pertinence toujours actuelle de l’exigence d’une lutte contre toutes les formes d’impunité, un engagement contre la violence politique, et en faveur de la liberté d’expression.
La réconciliation prônée par Soro Guillaume à partir de la tribune de l’Assemblée nationale le 3 avril 2017, est à saluer, même si elle montre que de meilleures leçons de l’attentat de Bouaké, pourraient être tirées.
Si l’occasion de la célébration du 29 avril 2007 permet de s’interroger sur les résultats précis et indiscutables de l’enquête sur cette tragédie manquée, une tragédie sont nul ne peut prévoir avec certitude, les conséquences sur la stabilité de la Côte d’Ivoire, ce serait une excellente chose. Dieu guide les ivoiriens, et protège la Côte d’Ivoire !
T.A.B et O.D