Wagner : un mal en pleine mutation qui gangrène le Sahel

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Au Sahel, la transformation de Wagner en Africa Corps marque une nouvelle étape dans l’expansion de l’influence russe, synonyme de violence et d’exploitation économique.

Depuis 2018, le groupe paramilitaire russe Wagner, fondé par Yevgeny Prigozhin, s’implante en Afrique et notamment au Sahel. Ses opérations suscitent des interrogations sur ses réelles motivations, entre coopération militaire et exploitation des ressources locales. Au Mali, au Burkina Faso et au Niger, les interventions des mercenaires russes sont souvent marquées par des exactions contre les civils, soulevant des préoccupations sur leur impact à long terme. Suite à la mort de Prigozhin en août 2023, le ministère russe de la Défense a repris en main les opérations africaines de Wagner, donnant naissance à Africa Corps. Cette transition vise à maintenir l’influence russe tout en réorganisant ses opérations militaires dans la région.

Une expansion militaire sous couvert de coopération

Plusieurs milliers de mercenaires russes sont présents sur le continent. Au Mali, Wagner est présent depuis fin 2021, avec des effectifs estimés entre 1 500 et 2 500 hommes. Africa Corps y est déployé, avec environ 1 000 hommes, pour renforcer les capacités des Forces armées maliennes (FAMA) dans la lutte contre le terrorisme. L’arrivée de matériel militaire russe consolide cette coopération, dans le but d’améliorer la sécurité du pays face aux menaces.

Au Burkina Faso, Africa Corps est présent depuis janvier 2024, avec une base militaire à Loumbila. Ce déploiement s’inscrit dans une stratégie plus large de coopération militaire avec la Russie, visant à renforcer la sécurité nationale. Le pays, confronté à des défis sécuritaires importants, espère que cette coopération contribuera à stabiliser la situation.

Enfin, au Niger, Africa Corps est déployé depuis avril 2024, afin d’améliorer les capacités opérationnelles des forces armées locales. L’implication d’Africa Corps dans la région reflète une stratégie russe visant à étendre son influence en tentant de répondre aux besoins sécuritaires locaux.

Des accusations d’exactions contre les populations civiles

L’implication du groupe paramilitaire russe dans des actes de violence est régulièrement signalée au Mali. Plusieurs rapports font état d’exactions commises lors d’opérations anti-insurrectionnelles, menées avec l’armée nationale. Selon les données de l’ACLED, 71 % des opérations impliquant Wagner au Mali se traduisent par des violences contre les civils,dépassant largement le taux de violence commise par les forces étatiques ou les groupes insurgés.

Les Nations unies et des associations de défense des droits humains, comme Human Rights Watch, alertent sur ces violations. Ils dénoncent des massacres, des exécutions sommaires et des pillages commis par les forces maliennes et les combattants de Wagner lors de leurs opérations contre-insurrectionnelles. Le gouvernement malien dément toute implication dans ces exactions et présente, aujourd’hui encore, Wagner comme un partenaire essentiel dans la lutte contre le terrorisme.

Un intérêt économique et géopolitique

L’engagement du groupe Wagner au Sahel ne se limite pas aux seuls enjeux sécuritaires. Au Mali, riche en minerais stratégiques comme l’or, la Russie pourrait suivre une stratégie similaire à celle adoptée dans d’autres régions d’Afrique. Wagner a pris le contrôle de plusieurs mines d’or au Mali, ce qui lui permet de financer ses opérations tout en consolidant l’influence de la Russie dans la région. Depuis l’invasion de l’Ukraine, Wagner aurait gagné plus de 2,5 milliards de dollars grâce à l’extraction illicite d’or, notamment en Afrique.

Les mines d’or du Mali représentent un enjeu économique majeur pour la société paramilitaire. Selon certaines sources, le groupe a créé des sociétés minières locales pour exploiter ces ressources, avec l’objectif de sécuriser des sites industriels importants comme celui de Loulo-Gounkoto, l’un des plus productifs du pays. Cependant, cette exploitation est souvent associée à des pratiques controversées, dont l’extraction illicite, qui génère des revenus substantiels pour Wagner. En février 2024, le groupe a étendu son contrôle sur les ressources aurifères du Mali en prenant le contrôle d’une mine artisanale à Intahaka.

La disparition d’Evgueni Prigozhin, fondateur du groupe Wagner en 2023, a rebattu les cartes. Moscou semble vouloir restructurer ses opérations via Africa Corps, une nouvelle entité militaire dédiée à l’Afrique. Cette transition pourrait modifier l’organisation des forces russes sur le continent tout en maintenant leur présence humainement et économiquement catastrophique.

Constantine

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